« Surveillez vos propres limites, processus et valeurs »

Franchir le pas

L’entreprise Vuka Consulting de Mattias Pruym facilite le commerce international avec la Tanzanie pour les entreprises d’Europe et du reste du monde, en se concentrant surtout sur les secteurs de l’énergie et de l’exploitation minière. De leur côté, les mines africaines comptent sur Mattias pour obtenir le soutien européen pour des minéraux critiques. Le contexte semble intense, et il l’est. Mattias garde son sang-froid. Il a appris à le faire. Mais de temps en temps, la passion reprend le dessus. « Le Serengeti, le Kilimandjaro, Zanzibar : tout ça, c’est la Tanzanie ! Mais la Tanzanie, ce sont aussi des possibilités d’affaires. De bonnes affaires, car ce ne sont pas les possibilités qui manquent. »

Quel est votre meilleur conseil pour les entrepreneurs débutants ?

« Ce que j’ai appris moi-même : prenez le temps de franchir les étapes nécessaires. Ne vous laissez pas entraîner par des personnes qui veulent aller très vite, en sautant des étapes. Ce genre de profils veulent en général que vous vous mettiez illico au travail, car il y a des opportunités directes. Ils veulent voir des résultats tout de suite, coûte que coûte. Mais d’après mon expérience, vous y perdez souvent dans l’aventure, car les personnes qui veulent que tout aille au plus vite sont parfois aussi celles qui vous paient peu, ou pas du tout. Faites confiance à vos propres processus, définis par vous, pour vos clients. Ne vous embarquez pas avec des personnes qui ne respectent pas vos processus et vos limites. Un starter pourrait avoir l’impression que c’est une énorme opportunité. Et il y a bien sûr la volonté de décrocher des demandes et de trouver des clients le plus rapidement possible. Mais il ne faut pas se laisser piéger. »

Imaginez, vous recommencez tout demain. Que feriez-vous autrement ?

« J’appliquerais des tarifs plus élevés. Aujourd’hui, je connais bien mieux ma valeur qu’à mes débuts. Nous avons une réelle valeur sur le marché. Il y a peu d’entreprises comme la nôtre, capables de faire ce que nous faisons. Quand on débute comme consultant, l’une des grandes questions est de savoir quel prix on peut ou doit demander. Et vous tomberez bien sûr toujours sur des personnes qui vont questionner votre prix. Ce prix est peut-être calculé en estimant qu’une mission durera X heures. Si cette estimation est remise en question et que vous entrez dans le jeu, vous vous laissez sous-payer, ce qui n’est pas positif. Si je travaille pour un patron, je ne veux pas être sous-payé. Et il ne faut donc pas accepter ça non plus quand on travaille pour soi-même. Votre revenu est la base de beaucoup de choses dans votre vie. Si vous vous laissez sous-payer, vous limitez vos possibilités ainsi que la croissance de votre entreprise. Bien sûr, vous voulez gagner des clients, et donc éviter de créer des difficultés. Mais quand viendra le prochain client ? Mieux vaut demander un prix juste. »

Qu’est-ce que vous faites autrement, et pourquoi ça marche ?

« J’ai toujours été fasciné par le monde diplomatique, notamment les institutions européennes. Et je suis convaincu que nous avons besoin d’institutions diplomatiques pour faciliter le commerce international. J’aime beaucoup travailler avec elles. Nous sommes régulièrement en contact avec différentes personnes au sein des institutions européennes. Cela nous permet d’avoir un accès direct aux informations nécessaires ou d’obtenir les confirmations dont nous avons besoin pour mettre en œuvre une stratégie spécifique pour notre client. C’est là que réside notre force. Un autre facteur de notre succès ? La gentillesse est une qualité particulièrement appréciée dans toutes les cultures. On ne se trompe jamais en étant aimable, que ce soit dans la communication directe ou dans les e-mails et les messages. Il faut aussi penser à respecter ses propres valeurs culturelles. En Belgique, nous trouvons important de mettre les choses par écrit. Si une personne est disposée à mettre les choses par écrit avec vous, c’est un signe de confiance. C’est une bonne chose. »

Quelle évolution du monde des entrepreneurs suivez-vous de plus près ?

« Quand on travaille dans le commerce international, on sait que tout ce qui se passe à l’échelle internationale a une répercussion sur nos activités. Les prix augmentent, l’inflation fait mal. La législation change en Belgique, et en Europe. En Tanzanie aussi, tout est en constante évolution. Ce sont des choses que je dois suivre en permanence. En tant qu’entrepreneur, je dois donc être un très bon lecteur. Et vraiment bien comprendre les dynamiques qui régissent le marché, pour avoir une longueur d’avance. Les clients qui investissent doivent être protégés. Le fait de savoir ce qui se passe rend aussi le rôle du consultant pertinent. »

  Quelle est votre 'North Star' à vous ?

« Ma North Star personnelle est d’être un exemple pour mes enfants en tant que père. Rien n’est plus important pour moi. Pour mon entreprise, c’est mon ambition de me positionner comme la principale référence en Afrique pour le domaine de l’exploitation minière, afin de pouvoir attirer des fonds européens. C’est mon objectif en tant que chef d’entreprise. C’est un processus avec des hauts et des bas. Je compare parfois le responsable d’entreprise à un artiste. Vous investissez beaucoup de vous-même dans vos projets. On donne aussi beaucoup de soi-même à ses clients. Et on peut aussi se perdre dans tout cela. Je trouve donc très important de maintenir le bon équilibre. »