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Protection contre le traitement défavorable

Protection offerte par les lois anti-discrimination

Les lois anti-discrimination offrent une protection contre le traitement défavorable (ou les ‘représailles’ ou ‘mesures préjudiciables’).

Dernière mise à jour le 19 janvier 2024

L’employeur ne peut pas prendre de mesures préjudiciables à l’encontre du travailleur qui a introduit un signalement, une plainte ou une action en justice lié à la violation des lois anti-discrimination pour des motifs liés à ces démarches ou au contenu des faits invoqués.

Les témoins – formels ou informels – sont aussi protégés.

Une mesure préjudiciable s'entend notamment de la rupture de la relation de travail, la modification unilatérale des conditions de travail ou la mesure préjudiciable intervenue après la rupture de la relation de travail.

Pour une meilleure lisibilité, nous abordons ici tant la protection contre le licenciement que la protection contre les autres mesures préjudiciables.

Nous examinons cette protection dans le cadre de la relation de travail.

Deux précisions importantes :

  • Les offres d’emploi et le processus de recrutement sont aussi englobés par la notion de relations de travail
  • La protection assurée par les lois anti-discrimination englobe aussi les situations :
    • De harcèlement sexuel
    • De violence et de harcèlement moral à caractère discriminatoire (en revanche, la protection en cas de violence et de harcèlement moral à caractère non discriminatoire est assurée par la loi relative au bien-être au travail)

Champ d’application

Que faut-il entendre par signalement, plainte ou action en justice ?

Il y a lieu d'entendre par signalement, plainte ou action en justice :

  • Un signalement fait ou une plainte introduite au niveau de l'entreprise ou de l'institution qui occupe la personne. Précisons à cet égard que la demande d’intervention psychosociale informelle est à considérer comme un signalement.
  • Un signalement ou une dénonciation fait ou une plainte introduite auprès des fonctionnaires chargés de la surveillance (par exemple, le Contrôle du bien-être au travail)
  • Un signalement fait ou une plainte introduite auprès d'un service chargé de la surveillance des actes et du fonctionnement des autorités administratives ou des instances administratives, ou qui intervient afin de régler les litiges de façon extrajudiciaire (services de médiation ou fonctionnaire intégrité)
  • Un signalement fait ou une plainte introduite auprès de l'Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (ci-après : l’Institut), du Centre interfédéral pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme et les discriminations (ci-après : UNIA) ou d'un groupement d'intérêts (y compris les syndicats)
  • Une déclaration introduite auprès des services de police, une plainte avec constitution de partie civile déposée auprès du juge d'instruction, ou une notification faite à l'auditeur du travail
  • Une action en justice introduite par la personne concernée par la violation alléguée
  • Une action en justice introduite par l'Institut, UNIA ou un groupement d'intérêts au bénéfice de la personne concernée par la violation alléguée
  • Une action en justice introduite par l'Institut, UNIA ou un groupement d'intérêts en son nom propre

Quels travailleurs sont protégés ?

Travailleur qui a fait un signalement, a déposé une plainte ou intenté une action en justice

Le travailleur qui démontre qu'un signalement a été fait ou qu'une plainte a été introduite ou qu'une action en justice a été intentée en raison d'une violation des lois anti-discrimination est protégé.

Lorsque le travailleur fait un signalement ou introduit une plainte ou une action en justice ou lorsque ces actes sont accomplis par une autre instance, comme la loi le permet, il peut en demander la preuve écrite et datée à l'organisation, au service ou à l'institution auprès duquel l'acte est accompli.

Vous trouvez plus d’informations à ce sujet ci-dessous, sous les explications relatives à la charge de la preuve.

Autres bénéficiaires de la protection

La protection est également d'application aux personnes :

  • Qui interviennent comme témoin (un document daté et signé n’est plus requis)
  • Ou ont fait un signalement ou introduit une plainte, au bénéfice du travailleur concerné par la violation alléguée
  • Et aux personnes qui donnent des conseils ou apportent aide ou assistance à cette personne
  • Ainsi qu'à toute personne qui invoque la question de la violation des lois anti-discrimination

La protection s'applique également à la personne au bénéfice de laquelle ces actes sont accomplis.

Le témoin informel est désormais protégé, il doit cependant apporter son soutien actif à la victime. La simple connaissance des faits dénoncés n’est pas suffisante.

Exemples : personnes qui ont orienté la victime vers le représentant syndical, qui ont encouragé la personne à porter plainte, qui ont témoigné au bénéfice de la victime, ont pris sa défense lors d’une discussion avec le supérieur hiérarchique, …

Les témoins peuvent aussi demander la preuve écrite dont il est question ci-dessus, et que nous détaillons sous nos explications relatives à la charge de la preuve.

Notre conseil

Faites en sorte de vous tenir informé de tout ce qui se passe sur le lieu de travail.

Catherine introduit une demande d’intervention psychosociale formelle pour harcèlement moral de la part d’un collègue. Imaginez que l’employeur de Catherine veuille licencier un autre collègue, Kurt, parce que ses prestations ne sont pas à la hauteur. Ce motif n’a donc rien à voir avec le harcèlement moral dont Catherine prétend être la victime.

Vous apprenez par la suite que Kurt est allé trouver un délégué syndical à plusieurs reprises pour défendre Catherine. Kurt est donc protégé contre les représailles. S’il invoque qu’il a été licencié en raison de son soutien à Catherine, cela risque de compliquer son dossier de licenciement.

Quels sont les critères protégés ?

Par la loi Genre :

Le sexe, la grossesse, la procréation médicalement assistée, l'accouchement, l'allaitement, la maternité, les responsabilités familiales, l'identité de genre, l'expression de genre, les caractéristiques sexuelles et le changement de sexe

Par la loi anti-racisme :

La prétendue race, la couleur de peau, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, la nationalité

Par la loi réprimant les autres formes de discrimination :

L'âge, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la conviction syndicale, la langue, l'état de santé, un handicap, une caractéristique physique ou génétique ou l'origine sociale

Début et durée de la protection

La période de protection débute au moment où l’employeur a connaissance du signalement, de la plainte ou de l’action en justice ou a pu raisonnablement en avoir connaissance.

Il ne faut donc plus attendre l’introduction formelle du signalement, de la plainte ou de l’action en justice.

La protection a une durée indéterminée. En revanche, le renversement de la charge de la preuve au profit du travailleur est limité dans le temps (voyez ci-après).

Charge de la preuve

Preuve du signalement, de la plainte ou de l’action en justice

Comme nous l’avons mentionné, seul le travailleur qui démontre qu'un signalement a été fait ou qu'une plainte a été introduite ou qu'une action en justice a été intentée en raison d'une violation des lois anti-discrimination est protégé. Cette preuve peut être apportée par toute voie de droit.

Attestation

La loi a cependant facilité cette preuve pour les travailleurs concernés, ce qui peut être utile dans le cadre d’une procédure judiciaire.

En effet, lorsque le travailleur fait un signalement ou introduit une plainte ou une action en justice, ou lorsque ces actes sont accomplis par une autre instance, comme la loi le permet, il peut en demander la preuve écrite et datée à l'organisation, au service ou à l'institution auprès duquel l'acte est accompli.

Cette attestation doit contenir les informations suivantes :

  • L'identité de la personne
  • Les démarches réalisées
  • La date de la démarche
  • La date de la demande de la preuve

L’employeur peut donc être amené à fournir ce document en cas de signalement ou de plainte fait dans l’entreprise. Il est alors responsable du traitement des données précitées.

Preuve que la mesure préjudiciable n’est pas liée au signalement, à la plainte ou à l’action en justice

Lorsque l'employeur prend une mesure préjudiciable à l'égard du travailleur concerné par la violation alléguée dans les douze mois après avoir eu connaissance du signalement ou de la plainte ou après avoir pu raisonnablement avoir eu connaissance de ces démarches, il incombe à l'employeur de démontrer que la mesure préjudiciable n'est pas liée au signalement ou à la plainte, ou à leur contenu.

Cette charge de la preuve incombe également à l'employeur lorsque la mesure préjudiciable est intervenue après que l'action en justice ait été intentée et ce, jusqu'à trois mois suivant le jour où la décision judiciaire est passée en force de chose jugée.

Après ces douze (ou trois) mois, la charge de la preuve n’est plus renversée. Ce sera donc au travailleur de démontrer que la mesure préjudiciable prise à son égard est liée à son signalement, sa plainte, son action en justice, ou au contenu des faits invoqués.

Demande de réintégration et indemnisation

Demande de réintégration (facultatif)

Lorsque l'employeur adopte une mesure préjudiciable à l’encontre de son travailleur (licenciement, modification unilatérale des conditions de travail, …), le travailleur concerné par la violation alléguée, ou, avec l'accord de celui-ci, l'Institut, UNIA ou un groupement d'intérêts peut demander que l'entreprise le réintègre ou lui laisse exercer sa fonction sous les mêmes conditions que précédemment.

La demande de réintégration n’est donc plus obligatoire.

Cette demande de réintégration est introduite par écrit dans les trente jours qui suivent la date de la notification du préavis, de la rupture sans préavis ou de la modification unilatérale des conditions de travail.

L'employeur doit prendre position sur cette demande dans le délai de trente jours suivant sa notification.

L'employeur qui réintègre la personne dans l'entreprise ou dans l'institution ou lui laisse exercer sa fonction sous les mêmes conditions que précédemment est tenu de payer la rémunération perdue du fait du licenciement ou de la modification des conditions de travail, et de verser les cotisations des employeurs et des travailleurs afférentes à cette rémunération.

Paiement de dommages et intérêts

L'employeur est tenu de payer des dommages et intérêts au travailleur protégé :

  • Lorsque celui-ci n'est pas réintégré suite à sa demande ou ne peut pas exercer sa fonction dans les mêmes conditions que précédemment, et que la mesure préjudiciable est en lien avec le signalement, la plaine, l’action en justice ou le contenu des faits dénoncés par le travailleur
  • Lorsque le travailleur n'a pas introduit de demande de réintégration, et que la mesure préjudiciable est en lien avec le signalement, la plaine, l’action en justice ou le contenu des faits dénoncés par le travailleur

Montant de l’indemnité

Les dommages et intérêts correspondent, selon le choix du travailleur protégé :

  • Soit à un montant forfaitaire correspondant à la rémunération brute de six mois.
  • Soit au préjudice réellement subi par le travailleur. Dans ce dernier cas, il appartient au travailleur de prouver l'étendue du préjudice qu'il a subi.

Cumul

Les dommages et intérêts visés ici peuvent être cumulés avec les dommages et intérêts pour la discrimination elle-même.

Exemple

Caroline passe à côté d’une promotion en raison de sa grossesse. Elle entame une procédure judiciaire pour obtenir réparation. Le juge estime qu’il s’agit d’une discrimination, et octroie à Caroline des dommages et intérêts équivalents à six mois de salaire brut. Cette indemnité couvre le préjudice qui découle de la discrimination proprement dite.

L’employeur est contrarié parce que Caroline a entamé une procédure judiciaire, et il la licencie. De ce fait, Caroline subit à nouveau un préjudice qui, cette fois, découle de la mesure préjudiciable (le licenciement) qui a été prise de manière injustifiée en guise de représailles. Elle peut aussi obtenir des dommages et intérêts à cet égard.

Abus de la procédure

La protection contre les mesures préjudiciables ne s'applique pas en cas d'usage abusif des procédures. Cet abus peut donner lieu au paiement de dommages et intérêts.

Il y a abus lorsque le droit est exercé :

  • D’une manière qui dépasse manifestement les limites de l’exercice de celui-ci par un travailleur prudent et diligent
  • Ou lorsque les procédures sont utilisées dans un but autre que celui pour lequel elles sont établies (par exemple, pour éviter un licenciement ou nuire à la réputation d’autrui par vengeance

L’abus sera apprécié par le juge en tenant compte des circonstances de fait qui démontrent que le travailleur a fait usage des procédures dans l’unique but de tirer profit de la situation. Le juge évaluera aussi les dommages.

Ceci qui précède vaut aussi en cas de témoignage abusif.

Attention : ce n’est pas parce que la demande est non fondée, qu’il y a abus.

Pour conclure

La protection est similaire à celle qui est prévue en cas de violence ou de harcèlement moral ayant un caractère non discriminatoire.

Une différence consiste en ce que, dans les situations en lien avec de la discrimination, l’employeur ne peut pas prendre de mesures vis-à-vis du travailleur protégé pour éliminer le danger, prévenir ou limiter les dommages, et ce, même si ces mesures ont un caractère proportionnel et raisonnable. Ceci est en revanche possible dans le cadre de la protection offerte par la loi bien-être.

Références légales

  • Loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie
  • Loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les hommes et les femmes (appelée la ‘loi Genre’)
  • Loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination
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