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Travail en équipe bis : entre tolérance fiscale et lourdeur administrative

La variante travail en équipe bis a été introduite au printemps 2024. Ce régime permet aux employeurs dont les équipes varient en termes d’ampleur de bénéficier de la dispense fiscale pour travail en équipe. Une récente circulaire apporte des clarifications améliorant ainsi la sécurité juridique mais augmenta 3nt la charge administrative.

Pourquoi existe-t-il une variante travail en équipe bis ?

Pour bénéficier de l’avantage fiscal pour le travail en équipe, vous devez respecter plusieurs conditions. L’une d’entre elles est que les équipes successives doivent effectuer le même travail en termes d’ampleur. L’incertitude a longtemps régné sur la signification précise de ce critère.

Dans un arrêt du 8 février 2024, la Cour constitutionnelle a estimé qu’il n’était pas inconstitutionnel d’appliquer la dispense fiscale pour le travail en équipe uniquement pour les entreprises dans lesquelles les équipes exécutaient un travail identique en termes d’ampleur.

En réaction à cet arrêt, le législateur a introduit le régime de travail en équipe bis en mai 2024. Il avait pour but d’éviter aux entreprises dans lesquelles l’ampleur du travail des équipes successives n’est pas toujours équivalente de perdre totalement la dispense.

Le régime bis prévoit dès lors un facteur de correction qui varie en fonction de la différence d’ampleur entre les équipes successives. Plus la différence est grande et plus la dispense diminue.

En savoir plus : « Réglementation 'travail en équipe bis' pour une plus grande sécurité juridique »

Vers une plus grande sécurité juridique

Si le régime « travail en équipe bis » vise à améliorer la sécurité juridique, il n’en reste pas moins source de nombreuses questions pratiques et juridiques.

Le SPF Finances a récemment publié une circulaire qui apporte enfin des clarifications sur l’application de ce régime, notamment pour le travail intérimaire et le travail en continu.

Nous parcourons ci-après les principales nouveautés de la circulaire du 30 juillet 2025

Tolérance administrative d'écart de maximum 10 %

Précisions quant à la notion d’ampleur 

Bien que la nouvelle circulaire ne donne toujours pas de définition concrète de la notion d’ampleur, elle propose quelques pistes permettant d’en apprécier la portée.

Selon la circulaire, l’ampleur doit en principe se mesurer sur base de la production (output) de l’équipe. Dans les cas où cette mesure ne serait pas possible, le fisc accepte toutefois que l’on prenne d’autres éléments en considération, tels que le nombre de membres que comptent les équipes (exprimé en équivalents temps plein), ou encore le nombre d’heures prestées.

L’introduction de la variante bis ne doit pas conduire à une interprétation rigide de la dispense pour le travail en équipe classique. L’intention du législateur n’a en effet jamais été d’exiger une ampleur de travail parfaitement identique entre les équipes successives. Un écart ponctuel, dû par exemple à l'absence d'un travailleur (pour cause de maladie) ou en raison d'un défaut mécanique, ne devrait pas automatiquement aboutir à l’application de la variante bis. Une certaine souplesse est donc nécessaire dans l’appréciation de cette condition, surtout en cas d’événements indépendants de la volonté de l’employeur.

Tolérance de 10%

Dans ce contexte, la circulaire autorise un écart maximal de 10 % dans l’ampleur du travail entre les équipes successives. Ce pourcentage doit être calculé chaque jour et pour chaque système d’équipe, sur base de la formule suivante :

\(\large { \textsf{ nombre de membres de la } \textbf{plus grande} \textsf{ équipe } – \textsf{ nombre de membres de la } \textbf{plus petite} \textsf{ équipe } \over \textsf{nombre de membres de la } \textbf{plus grande} \textsf{ équipe } }\)

Si l’écart demeure dans cette marge de 10 % chaque jour ouvrable du mois, l’employeur peut appliquer la dispense pour le travail en équipe « classique » pour ce mois.

Un écart supérieur à 10% ne sera pas toléré, à moins qu’il ne résulte de circonstances indépendantes de la volonté de l’employeur (maladie, congé exceptionnel, accident,…).

Pour savoir s’il faut appliquer la variante classique ou la variante bis, il est important de connaître l’intention de l’employeur. Cette intention ressort de la planification du travail.

Plus d’infos : « Appliquez la bonne variante de travail en équipe et évitez les amendes »

Régime classique ou variante bis ?

Choix de l’employeur

Le régime classique pour le travail en équipe et la variante bis continuent de coexister. En tant qu’employeur, vous devez choisir chaque mois le régime de dispense à appliquer.

Si votre entreprise compte plusieurs systèmes d’équipe, vous devez déterminer chaque mois et pour chaque système, s’il relève du régime classique ou de la variante bis. Le régime applicable peut donc différer d’un mois à l’autre et d’un système d’équipe à l’autre.

Une même entreprise peut ainsi appliquer simultanément les deux régimes, à condition toutefois de calculer séparément la norme du tiers pour chaque régime.

Il n’est en effet pas possible de cumuler les prestations de plusieurs types de dispenses pour un même mois dans la détermination de la norme du tiers.

Ce principe connait toutefois une exception. Les heures qui auraient été prestées dans un système de travail en équipe classique et dans un système de travail en continu classique pourront être comptabilisées ensemble pour le calcul de la norme du tiers. Il en va de même si le travailleur a travaillé dans la variante bis de ces deux régimes.

Enfin dans l’hypothèse où la condition de la norme du tiers serait atteinte par un travailleur dans deux régimes pour un même mois, la dispense ne pourrait pas être appliquée pour les deux régimes.

Vous ne pouvez en effet appliquer qu’un seul régime pour le mois concerné, la rémunération d’un travailleur ne pouvant être prise en compte que dans un seul type de dispense pour un même mois. 

Notre conseil : veillez aux respect des conditions d’application de la dispense

Le régime de travail doit répondre à plusieurs conditions pour être considéré par le fisc comme du travail en équipe.

Plus d’infos : « Qu'est-ce que le travail en équipe, la prime d'équipe/de nuit, le travail de nuit et le travail en continu ? »

Concrètement, cela implique que vous devez, chaque mois, évaluer pour chaque système d’équipe s’il remplit encore les conditions du travail en équipe classique.

Veillez également à documenter l’évaluation de l’ampleur du travail.

A cet égard, la circulaire rappelle que la pratique consistant à diviser artificiellement une équipe dans le seul but de répondre aux conditions d’application de la dispense n’est pas autorisée.

Possibilité d’appliquer la variante bis aux systèmes classiques

En tant qu’employeur, vous pouvez ainsi appliquer le régime classique de travail en équipe aux systèmes qui répondent à la définition du travail en équipe classique et, la variante bis aux autres systèmes.

Mais vous avez également la possibilité d’appliquer la variante bis à tous vos systèmes d’équipe, y compris ceux qui relèvent du régime classique. Cette option peut se révéler intéressante notamment si certains de vos travailleurs alternent entre différents régimes.

Cette alternative est illustrée par un exemple concret dans la circulaire du 30 juillet 2025 (voir ci-dessous dans « Source » le lien vers cette circulaire).

Inclure ou exclure l’équipe de nuit ?

Imaginons que dans votre entreprise, le travail soit organisé dans un système de 3 équipes successives : l’équipe du matin, l’équipe du soir et l’équipe de nuit. Si ces équipes effectuent un travail de même objet mais que l’ampleur du travail diffère, vous devez, en tant qu’employeur, décider chaque mois si :

  • Vous intégrez l’équipe de nuit dans le système de travail en équipe
  • Vous excluez l’équipe de nuit du système de travail en équipe

Vous intégrez l’équipe de nuit dans le système de travail en équipe ?

Dans ce cas, vous pouvez appliquer la dispense pour le travail en équipe bis aux rémunérations éligibles des travailleurs des trois équipes (pour autant que toutes les autres conditions soient remplies).

Le facteur de correction devra alors être calculé compte tenu de l’ampleur du travail effectué par les trois équipes.

Vous excluez l’équipe de nuit du système de travail en équipe ?

Dans ce cas, vous pouvez uniquement appliquer la dispense pour le travail en équipe bis aux rémunérations éligibles des travailleurs des équipes du matin et du soir (pour autant que toutes les autres conditions soient remplies bien entendu). Vous devrez alors calculer le facteur de correction sans tenir compte de l’équipe de nuit.

Par ailleurs, vous pourrez appliquer la dispense pour le travail de nuit aux travailleurs de l’équipe de nuit pour lesquels la norme du tiers est remplie.

Cette liberté de choix comporte toutefois des limites, qui sont illustrées dans la circulaire.

Comment calculer le montant de la dispense ?

La circulaire apporte également des précisions sur la manière concrète de calculer la dispense.

Un seul facteur de correction pour l'ensemble de l'entreprise

Les employeurs qui utilisent la variante bis doivent réduire proportionnellement la dispense lorsque la différence au niveau de l’ampleur du travail entre équipes successives augmente. Plus la différence est grande et plus la dispense diminue.

Plus d’infos sur les 4 étapes de ce calcul : « Réglementation 'travail en équipe bis' pour une plus grande sécurité juridique »

La circulaire vient confirmer le principe selon lequel il faut calculer un seul facteur de correction par mois pour l’ensemble de l’entreprise. Ce facteur vaut alors pour tous les systèmes relevant de la variante bis, y compris les systèmes de travail en continu bis.

En d’autres termes, il n’est pas possible de calculer le pourcentage d’écart au niveau d’un département ou d’une ligne de production.

Dans la pratique, le respect de cette condition peut toutefois s’avérer difficile (notamment pour les entreprises ayant plusieurs établissements).

Double application du facteur de correction

Par ailleurs, la circulaire rappelle que dans la variante bis, le facteur de correction doit être appliqué tant :

  • Au pourcentage de 22,8 % ou 25 % des rémunérations entrant en considération
  • Qu’au montant du précompte professionnel retenu sur ces rémunérations

La dispense fiscale doit ensuite être limitée au plus bas de ces deux montants.

Exemple

L’ensemble des rémunérations imposables s’élève à 4 500 euros, le précompte professionnel à 605 euros et le facteur de correction à 15 %.

Ensemble des rémunérations imposables

4 500 euros

Dispense fiscale de 22,8 %

1 026 euros

Facteur de correction de 15 % sur le montant de la dispense

872,1 euros

Précompte professionnel

605 euros

Facteur de correction de 15 % sur le montant du précompte professionnel

514,25 euros

Dispense fiscale finale

514,25 euros

L’application du facteur de correction au précompte professionnel (514,25 euros) résulte en un montant plus bas que l’application du facteur de correction à 22,8 % des rémunérations imposables (872,10 euros). C’est pourquoi la dispense fiscale est limitée à 514,25 euros

Ce point est juridiquement difficile parce que la double application du facteur de correction ajoute une restriction supplémentaire à la législation. 

Pas encore de réponse à toutes les questions

La nouvelle circulaire apporte des éclaircissements, néanmoins certaines questions d’application pratiques restent encore sans réponse et le règlement bis reste administrativement très complexe.

Pensons notamment au travail intérimaire (pour lequel les mêmes règles sont d’application) : En cas de travail intérimaire, l’agence intérimaire est assimilée à l’entreprise où le travailleur est effectivement occupé.

Par conséquent, les entreprises de travail intérimaire agréées qui mettent à disposition des travailleurs intérimaires à l'employeur doivent recevoir chaque jour et pour chaque intérimaire, des informations détaillées sur l’ampleur du travail et l’écart. Le facteur de correction devra également leur être communiqué chaque mois. Tout cela implique une charge administrative importante.

La nouvelle circulaire représente néanmoins une nouvelle étape pour garantir la sécurité juridique et éviter au maximum les problèmes d’interprétation lors de contrôles fiscaux.

Une mesure transitoire jusque fin 2026

La circulaire rappelle que la réglementation sur le travail en équipe bis est une mesure transitoire qui s’applique du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2026

Toutefois, tout porte à croire qu’une nouvelle réglementation durable devra être mise en place pour assurer une meilleure sécurité juridique.

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