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Pourquoi rogner sur la prime de fin d’année n’est pas une bonne idée

En cette période d’indexations salariales sans précédent, vous vous demandez peut-être si cette année, vous ne pourriez pas, en tant qu’employeur, renoncer exceptionnellement à verser la prime de fin d’année.

4 novembre 2022

Vous ne pouvez en tout cas pas prendre cette décision unilatéralement. Mais même si vos travailleurs renonçaient spontanément à leur prime de fin d’année, nous vous déconseillons de ne pas la verser, et ce en raison de deux obstacles juridiques. De plus, cela reviendrait à vous tirer une balle dans le pied, car la pénurie sur le marché du travail reste importante.

Augmentation salariale de 10 % en janvier

Les entreprises actives dans des secteurs dans lesquels l’indexation intervient une fois par an, le plus souvent en janvier, tablent actuellement sur une indexation de plus de 10 % dès 2023. Il est dès lors compréhensible que les employeurs cherchent des solutions et que la prime de fin d’année soit dans le viseur. C’est d’autant plus vrai pour les secteurs qui ont déjà été confrontés à une forte indexation cette année, car celle-ci entre en ligne de compte pour la prime de fin d’année.

Les secteurs ci-après entre autres connaissent une indexation annuelle en janvier : industrie alimentaire (CP 118 et 220) ; transport routier et logistique pour compte de tiers (CP 140.03) ; agriculture (CP 144) ; horticulture (CP 145) ; électriciens, installation et distribution (CP 149.01) ; commission paritaire complémentaire des employés (CP 200) ; employés du commerce international, du transport et de la logistique (CP 226) ; horeca (CP 302) ; gestion d’immeubles, agents immobiliers et travailleurs domestiques (CP 323) ; attractions touristiques (CP 333).

Conseil : consultez nos prévisions d’index

Votre personnel a-t-il droit à une prime de fin d’année (le plus souvent en vertu d’une CCT sectorielle) ? Le cas échéant, vous ne pouvez pas refuser unilatéralement de payer cette prime.

Vous pourriez toutefois demander à vos travailleurs de renoncer à leur prime de fin d’année, mais sous certaines conditions strictes. Nous vous déconseillons d’envisager d’y renoncer en raison des risques et des obstacles non négligeables y afférents.

Premièrement, l’ONSS ne doit pas tenir compte de votre accord relatif à la prime de fin d’année. Les cotisations patronales et les cotisations sociales personnelles restent donc dues. Deuxièmement, les travailleurs ne peuvent généralement renoncer valablement à la prime qu’après la naissance du droit à celle-ci.

Premier obstacle : les cotisations de sécurité sociale restent dues

Lorsque vos travailleurs renoncent à leur prime de fin d’année, l’ONSS ne doit pas en tenir compte. L’ONSS peut donc réclamer les cotisations de sécurité sociale tant personnelles que patronales sur cette prime, même si le travailleur n’a pas touché le moindre euro de la prime de fin d’année.

Il ne faut en revanche pas retenir de précompte professionnel sur ce supplément. Le fisc ne partage pas le point de vue de l’ONSS. En effet, un revenu n’est imposable qu’à partir du moment où il a été payé ou attribué. Mais lorsqu’un travailleur renonce à la prime de fin d’année, il n’est pas question de paiement ni d’attribution.

Deuxième obstacle : la renonciation n’est possible qu’après la naissance du droit à la prime

Selon la Cour de cassation, un travailleur ne peut renoncer à la prime de fin d’année qui lui revient qu’après la naissance du droit à la prime.

En effet, la source du droit qui prévoit l’octroi de la prime de fin d’année a souvent un caractère contraignant. De ce fait, on ne peut y renoncer à l’avance, même si le travailleur y consent. C’est le cas pour une prime de fin d’année prévue dans :

  • Une CCT sectorielle qui a été rendue obligatoire par arrêté royal
  • Une CCT sectorielle qui n’a pas été rendue obligatoire par arrêté royal, mais lorsque vous êtes membre de l’organisation patronale qui a conclu la convention
  • Une CCT conclue au niveau de l’entreprise

Même dans le rare cas où la CCT sectorielle n’a pas été rendue obligatoire (et vous n’êtes pas membre de l’organisation qui a conclu la convention), dans la pratique, mieux vaut ne pas y renoncer. En effet, une CCT de ce type pourra être rendue obligatoire un jour ou l’autre, peut-être avec effet rétroactif. Il ne s’agit donc quasiment que d’une possibilité purement théorique.

Restent comme sources de droit : le règlement de travail, le contrat de travail individuel et l’usage. Si la prime de fin d’année est prévue dans l’une de ces sources de droit, le travailleur peut renoncer à la prime avant la naissance du droit à celle-ci. Quoi qu’il en soit, il est vivement recommandé de demander l’accord du travailleur. En cas de dérogation au règlement de travail, c’est même une nécessité absolue.

Une renonciation est-elle possible après la naissance du droit ?

La majorité des juges acceptent effectivement que le travailleur puisse renoncer à la prime de fin d’année après la naissance du droit. Le mieux est toutefois d’attendre la date de paiement prévue avant que vous et le travailleur ne couchiez la renonciation sur papier.

Vous évitez ainsi d’enfreindre la loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs. Cette loi prévoit que les travailleurs ont droit au paiement de leur rémunération, ce qui implique qu’une renonciation ne peut intervenir qu’après le paiement de la prime ou après la date de paiement prévue.

Concrètement, vous devez d’abord verser la prime à votre travailleur, puis consigner la renonciation par écrit, et enfin demander au travailleur qu’il vous reverse le montant net perçu.

Optimisez plutôt votre politique salariale

Laisser vos travailleurs renoncer à la prime de fin d’année peut être une idée séduisante, mais des lois et des objections pratiques vous en empêchent. Ne sous-estimez pas l’impact négatif d’une telle tentative sur la motivation de vos précieux travailleurs.

« Même en cette période de crise, nous déconseillons de toucher à la prime de fin d’année. De nombreux travailleurs attendent avec impatience leur petit extra de fin d’année pour acheter les cadeaux de Noël et la dinde.

En outre, indépendamment des obstacles juridiques liés à une renonciation, la pénurie est toujours d’actualité sur le marché de l’emploi et le personnel compétent vaut de l’or. Si vous voulez éviter que vos meilleurs éléments vous quittent, optez pour des alternatives plus judicieuses, comme une optimisation de votre politique salariale. Cela vaut vraiment la peine et peut en outre être source de motivation. »

– Els Vanderhaegen, experte juridique du Secrétariat social Securex

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